Livre audio adulte
L’homme qui plantait des arbres
Nous sommes en 1913. Un promeneur fait une randonnée entre les Alpes et la Provence. Il y rencontre un berger silencieux Elzéard Bouffier, dont le calme et la placidité l’impressionnent. Alors qu’il est invité par le berger à passer la nuit, il l’observe en train de classer et de sélectionner un tas de glands. L’observant encore, il se rend compte que celui-ci plante, chaque jour, des arbres dans cette garrigue provençale menacée par la désertification. Le narrateur repart, le temps passe, il va à la guerre, mais lorsqu’il revient des tranchées, il n’oublie pas d’aller revoir Elzéard Bouffier, qui, tranquillement, obstinément, au mépris des guerres et des bouleversements, plante des arbres…. Et ce jusqu’à sa mort en 1947. Le narrateur constate à quel point ce pays désertique revit : à sa grande surprise, le hameau de Vergons, peuplé autrefois uniquement de chasseurs et d’orties, où rien ne poussait, revit littéralement. Les sources se sont remises à couler, une population s’est fixée dans le pays, y apportant de la jeunesse et du mouvement. Même l’air a changé, parce qu’il charrie des parfums nouveaux. Le narrateur conclut ainsi: « Plus de dix mille personnes doivent leur bonheur à Elzéard Bouffier ».
Critique
L’histoire de ce texte est presque aussi intéressante que le texte lui-même. Jean Giono a composé cette nouvelle en février 1953, afin d’honorer une commande pour le magazine américain The Reader’s Digest. Le thème était : « Le personnage le plus extraordinaire que j’ai rencontré ». Sauf que le magazine, après une petite enquête en Provence, doute de la véracité des faits, et de l’existence d’un Elzéard Bouffier. Giono l’écrivain aurait-il eu l’outrecuidance d’inventer un personnage ? Scandale ! Le Reader’s Digest refuse alors le texte. Qu’à cela ne tienne : Giono le donne au magazine Vogue, et, devant le succès public, le fait éditer gratuitement à 100 000 exemplaires.
La nouvelle a obtenu immédiatement un grand succès et bien des gens se sont demandés si le personnage de ce berger sublime était fictif ou non… Jean Giono laissa planer le mystère, mais dans une lettre qu’il envoya au conservateur des Eaux et Forêts des Basses-Alpes, en 1957, précisa enfin : « Navré de vous décevoir, mais Elzéard Bouffier est un personnage inventé. Le but était de faire aimer l’arbre, ou plus exactement faire aimer à planter des arbres. » Pari gagné…
Voilà une belle fable humaniste, une grande parabole sur l’écologie : Elzéard Bouffier , vieux berger paisible et silencieux, prend soin de cette terre, qui ne lui appartient pas, y plante des arbres pour amener la vie, fait revivre cette terre aride, et suscite l’espoir pour les générations futures. Comme le disait Benjamin Franklin, – et cette phrase pourrait être l’incipit de ce texte- : « Celui qui a planté des arbres n’aura pas vécu en vain ».
C’était un texte important pour Giono, dans la mesure où il porte un message écologique et politique fort. Il conclut sa lettre au conservateur des Eaux et Forêts par ces mots : « J’aimerais vous rencontrer, s’il vous est possible, pour parler précisément de l’utilisation pratique de ce texte. Je crois qu’il est temps qu’on fasse une « politique de l’arbre » bien que le mot politique semble bien mal adapté. «
L’intérêt majeur de ce texte est qu’il s’adresse à tous : enfants (à partir de 8 ou 10 ans), adultes… C’est une véritable parabole et fable sur les pouvoirs de la nature, très pédagogique et donc facilement étudiable en classe.
L’interprétation
La voix chaude et rocailleuse de Jacques Bonnaffé est très agréable à entendre… On croit entendre dans son souffle la rudesse de ce pays de garrigue. Cette voix chaude de conteur sied très bien à la nature du texte, qu’on croirait sorti du folklore provençal. L’illustration sonore – un morceau de guitare qui ponctue le texte – est assez jolie. Une interprétation sans faute, aussi sobre et joliment simple que le texte qu’elle met en valeur.
Johanna Luyssen, webmaster de Lire dans le noir