Rentrée audio : le point avec les éditeurs
Comment se porte le livre audio en cette rentrée ? Dans la mesure où le Syndicat National de l’Edition (SNE) ne dispose pas de chiffres spécifiques sur la question, difficile de dresser un véritable bilan chiffré pour 2010. C’est une année pourtant cruciale pour le secteur, puisque elle a vu l’entrée en vigueur de la TVA à 5,5% pour le livre audio. Désormais, il est taxé de la même manière que les livres « papier ». Cela a t-il changé les prix des ouvrages ? Et que nous réservent les éditeurs pour les derniers mois de 2010 ? Nous leur avons posé la question.
Une production stagnante ou en baisse. Chez Flammarion, rien n’a été publié cette année. Explications de l’éditrice Cécile Grenouillet : «Nous n’avons rien publié cette année, et nous ne publions rien l’année prochaine. On n’arrête pas totalement (les ventes se poursuivent en jeunesse), mais on réfléchit davantage à faire des coups. Les ventes ne sont pas satisfaisantes, on ne rentre pas dans nos frais. Par exemple, on misait beaucoup sur La mécanique du cœur, de Mathias Malzieu. C’est un ouvrage qui a très bien marché en librairie, mais en livre audio, ça a très peu marché : on en a tiré 4000 exemplaires, et vendu entre 1000 et 1200… Le dernier livre audio qui ait marché, c’était Le souci des plaisirs, de Michel Onfray, lu par Fanny Ardant. Mais il faut dire que c’est un public qui est habitué à entendre du Michel Onfray… En littérature, malheureusement, on ne rentre pas dans nos frais. On a aussi des difficultés à nous rendre visibles, dans la mesure où on ne fait que du Flammarion. Il faut dire que tant que nous ne vendons pas en vente directe, on aura du mal à faire mieux qu’Audiolib. Le marché est très présent en vente directe, et beaucoup moins en librairie…C’est ce qui nous handicape ». Chez Actes Sud Junior, on ne parle pas d’arrêt temporaire de production. Mais 2010 n’a pas été riche en publications audio, selon l’éditrice Isabelle Pehourticq. « D’ordinaire nous en publions quatre par an, cette année nous avons publié deux. On fonctionne véritablement sur des coups ponctuels, sur des projets que nous avons envie de porter. » Chez Audiolib, on reste sur une cinquantaine de parutions par an, « On continue sur notre progression », nous raconte Valérie Levy-Soussan. Chez Thélème, Hélène Letito se veut sereine. « On reste dans notre moyenne, de 20 à 30 titres par an, avec de très belles surprises, comme le succès du Dahlia Noir« . Malgré la TVA à 5,5%, les prix ne baissent guère, mais tout le monde est content.Quelle est l’incidence sur les prix de la baisse de la TVA sur le livre audio ? « C’est surtout formidable pour les libraires », nous assure Hélène Letito de Thélème. « Ils s’y retrouvent davantage avec nos prix alignés sur ceux du papier, et symboliquement, c’est très important : c’est la reconnaissance que le livre audio fait bien partie du livre ». Thélème affirme avoir légèrement baissé ses prix, tout comme Audiolib. Selon Valérie Levy-Soussan, « ça a eu un bon impact sur les libraires mais ça n’a pas changé grand-chose aux ventes ». D’autres affirment que la baisse des prix est impossible : « Nous n’avons pas vraiment baissé nos prix avec la baisse de la TVA, parce que nos coûts de production restent assez importants», explique Isabelle Pehourticq d’Actes Sud Junior. « On rentrait déjà à peine dans nos frais avant la baisse de la TVA… »
Du nouveau sur le front des nouvelles technologies. La popularité des smartphones et la mise en vente toute récente de l’Ipad et autres tablettes numériques donne des idées à certains éditeurs de livres audio. Audiolib a donc lancé une application Iphone spécifique, avec la possibilité d’écouter des extraits de livres audio. « Les chiffres sont bons, environ 15 000 personnes ont déjà téléchargé l’application, se réjouit Valérie Levy-Soussan. On lance la nouvelle version à la fin de l’année, où il sera possible de télécharger des titres directement via l’application. Cette dématéralisation du livre audio, Valérie Levy-Soussan y voit une possible évolution du secteur. « On va réellement pouvoir dématéraliser le livre, en enlevant tous les problèmes liés à la lecture sur écran : sur Iphone, pas de tournage de pages, par exemple. C’est parfait pour le livre audio qui est déjà, en soi et de plus en plus, un produit dématérialisé. Et cela induit une pratique nomade de la culture qui est, je trouve, très prometteuse.» En voiture sur l’autoroute avec un baladeur mp3, ou sur le téléphone : le livre audio occupe des territoires inédits. Des stars de la rentrée en livre audio.Amélie Nothomb en octobre, Jean Echenoz et Virginie Despentes en décembre, font leur rentrée littéraire chez Audiolib. Dans le cas d’Echenoz, dont le dernier roman, Des éclairs, vient d’être publié aux Editions de Minuit, l’écrivain est également le lecteur. Quant à Thélème, après le succès du Dahlia Noir, ils continuent sur leur lancée et publient Underworld USA, le dernier roman de James Ellroy. A noter également que l’acteur-phare du film Des hommes et des dieux, le célèbre Michael Lonsdale, lit pour Thélème L’art d’être grand-père, de Victor Hugo. Parution prévue en novembre.
