Prix du livre audio Lire dans le noir / France Culture : la parole aux gagnants

Touchés par la récompense, les lauréats du prix 2015 ont accepté de nous confier leurs impressions et quelques secrets de fabrication.
“C’est une belle reconnaissance, on est très contents”, réagit Gilles Bizouerne, auteur et lecteur de “Au lit!” (Oui’dire) primé dans la catégorie jeunesse. Il s’exprime pour trois, puisqu’à ses côtés la violoniste Ariane Lysimaque et la violoncelliste Isabelle Garnier ont participé de plain pied à une “belle aventure” réalisée en équipe. “Sans arrogance, nous sommes fiers de notre travail. Il reflète bien là où on en est, artistiquement.” Gilles Bizouerne salue aussi la “très bonne oreille” de Pascal Dubois, son éditeur, grâce à qui le projet est une réussite.

Vainqueur dans la catégorie document pour sa chronique de la vie aux urgences, “Alors voilà” (Audiolib), le médecin et écrivain Baptiste Beaulieu a trouvé l’expérience “super”. La mise en ondes de son récit correspond parfaitement à ce qu’il avait derrière la tête : “En écrivant, j’avais déjà l’idée d’une voix qui parlait et racontait l’hôpital. Un peu à la manière de la mythologie grecque.” L’auteur et le lecteur Emmanuel Dekoninck ont “un peu communiqué par Facebook” pour faire connaissance, raconte Baptiste Beaulieu, ravi : “il lit très bien”.

Sa maison d’édition a vu un autre ouvrage de son catalogue distingué : “Temps glaciaires”, de la célèbre auteure de polars Fred Vargas. La directrice d’Audiolib, Valérie Lévy-Soussan, apprécie qu’un “regard extérieur” ait récompensé “notre travail et de la qualité de nos livres audio”. Elle connaît la “grande sensibilité sonore” des bénévoles de Lire dans le noir comme des auditeurs de France Culture. Trouver les comédiens qui sauront mettre en valeur les oeuvres, explique-t-elle, c’est une question de “plaisir” et de “rencontres qui ont du sens”.

Produire des livres audio est aussi le signe d’une grande confiance dans les possibilités narratives du son. “En tant que soignant”, livre Baptiste Beaulieu, “j’ai tout de suite pensé que cela pourrait profiter à des personnes âgées et malvoyantes, qui n’ont plus forcément accès à la lecture”. Et aux autres, bien sûr. Le médecin est lui-même un amateur de livres lus, surtout “en voiture”.

Comme lui, Gilles Bizouerne se dit “sensible à la voix”, son “premier outil, en tant que conteur”. Il écoute aussi bien la radio que “des livres audio, surtout des histoires, des fééries”, et garde un excellent souvenir de “pièces de théâtre au casque à la Maison de la poésie”. “Il y a plus de dix ans que je travaille sur le métissage de la musique, de la parole et du chant”, autant de “langages qui en créent un autre, ou qui ne font plus qu’un, c’est selon”.

Pour qu’une création sonore lui plaise, il faut qu’il ait “l’impression qu’on me parle, que ce soit quelque chose d’intime” sans “trop d’artifices”. “Et la simplicité, c’est beaucoup de travail”, résume-t-il avec un sourire dans la voix. Plutôt que de courir après la virtuosité en “jouant des choses compliquées”, Gilles Bizouerne dit avoir travaillé à “la recherche d’une certaine justesse de coeur”, toujours “au service de l’histoire”.

Les lauréats espèrent tous que le prix permettra à de nouveaux publics de s’intéresser aux livres audio. Valérie Lévy-Soussan constate que “le marché français progresse mais il est encore assez restreint” (1% des ventes de livres en France en 2014), notamment en raison d’un “grand déficit de notoriété”. “Ce prix peut aider à faire reconnaître la qualité et l’actualité de nos enregistrements”, espère-t-elle, des “livres contemporains” à même de séduire “les libraires et les différents prescripteurs”.

Gilles Bizouerne y voit non seulement “une carte de visite” pour les auteurs mais aussi une chance de “découvrir les titres d’autres catégories”. “Tout ce qui peut ouvrir à la lecture, à la culture, c’est super important”, conclut Baptiste Beaulieu. “Surtout dans cette période.”