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Conteurs de mère en fils

Jihad Darwiche raconte des histoires depuis toujours, en français et en arabe. Il a grandi au Liban et a appris le conte par sa mère. Des Mille et une nuits aux épopées millénaires en passant par ses récits de la guerre au Liban, il perpétue une tradition ancestrale et libératrice.

Jihad Darwiche / DR« Je n’ai pas coupé le cordon » avoue Jihad Darwiche qui est devenu conteur comme l’était sa mère. »Autrefois la transmission se faisait au sein d’une même famille », explique le conteur. « Aujourd’hui ce lien est rompu, on trouve de moins en moins de conteurs. Pourtant raconter fait partie de notre vie, on raconte à un ami ou un bien aimé ce qu’il s’est passé durant son absence ».

Le conte est un partage et les auditeurs participent à son évolution. Jihad Darwiche adapte ses récits à chaque situation. « Le conteur ne raconte jamais la même histoire, il est libre de choisir ce qu’il va raconter et la manière dont il va le raconter au gré de ses envies. Debout, assis, sans lumière, dans la rue, entre amis ou sur scène. Celui qui l’écoute participe qu’il le veuille ou non au choix du mot qui va suivre. »

Pour Jihad Darwiche, le livre audio reste « une photographie » du conte à un moment donné. Pourtant il a accepté de figer quelques récits sur CD : Les mille et une nuits chez Oui-Dire, Sagesses et Malice de Nasreddine chez Coffragants… De l’Amérique à l’Orient, il a construit son répertoire comme des rencontres amoureuses. « D’abord on passe du temps pour apprendre à se connaître… Si le conte appartient à une culture différente de la mienne, j’aurais besoin pour le comprendre de m’imprégner de cette autre culture. Je ne pourrais pas le raconter si je ne tombe pas sous le charme ».

Jihad Darwiche sur scène / DRSi Jihad Darwiche aime autant le conte c’est aussi parce qu’il lui a apporté une formidable liberté. Grâce à ce mode de transmission, il a pu se débarrasser de ses démons. En 1984, après avoir quitté le Liban en guerre pour la France, il entame une correspondance sur cassettes audio avec sa mère. « Elle ne savait pas lire alors elle m’enregistrait des heures de cassettes dans lesquelles elle me racontait le mariage de la voisine, ou ce qu’elle avait dû faire pour aller chercher l’eau pendant le dernier bombardement… » Dans « Récits de vie en temps de guerre », il témoigne en racontant les gestes simples et héroïques des habitants de son pays plongé dans le chaos. Le conte lui permet de renouer avec les siens restés au loin.

couverture de Recits de vie en temps de guerrePour perpétuer ces traditions, il  forme désormais les jeunes conteurs à travers le monde sur le modèle du compagnonnage. Il explique que c’est un travail difficile car il est fait de patience dans un monde où tout va très vite : « il faut trouver son jardin secret, le laisser mûrir et adapter sa façon de dire à ses envies ». Il leur enseigne également l’éthique du conte. « La parole est à manier avec prudence. Elle n’est pas anodine car elle peut se transformer en prise de pouvoir », explique Jihad Darwiche. « Il ne s’agit pas de jouer le rôle du rabbin ou de l’imam ni d’imposer un point de vue. Nous devons respecter celui qui est en face, aimer mais ne jamais sanctifier… » précise-t-il. Pour transmettre son précieux savoir, il ambitionne d’ouvrir une école de contes, pourquoi pas en France.

 play.gifÉcouter un extrait de « Recits de vie en temps de guerre » de Jihad Darwiche

Le site de Jihad Darwiche

Le site des Editions Oui Dire
Le site de Coffragants


 


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