Livre + cd
Chemin de la belle étoile
Auteur : Sébastien Bertrand et Yannick Jaulin
Lu par : Sébastien Bertrand et Yannick Jaulin
Chemin de la belle étoile est une histoire de rencontres. Celle d’un conteur () et d’un accordéoniste (Sébastien Bertrand). Celle de la Vendée et du Liban. Une histoire à lire, à entendre et à voir puisqu’elle existe en livre, en CD et en spectacle.
UN RETOUR AUX RACINES
Après avoir assisté à la représentation de Forêts, joué à Nantes par Yannick Jaulin, Sébastien Bertrand envoie un long SMS au conteur. « Je suis assis dans ma voiture, il faut que je te dise. Je n’en parle pas souvent, mais la pièce m’a tant bouleversé. C’est comme si elle avait ouvert quelque chose en moi, quelque chose qui ne pourra pas se refermer. J’ai été adopté à l’âge de 9 mois, je suis né à Beyrouth, pas en Vendée. Mais, tu vois, on m’a tellement aimé depuis que je ne croyais pas avoir besoin d’aller regarder là où c’est noir, mais maintenant je sais que je dois le faire… »
Sébastien part donc avec Yannick au Liban visiter l’orphelinat où il a passé les premiers mois de sa vie. Chemin de la belle étoile est le récit de ce retour aux sources, écrit par Yannick Jaulin et conté par Sébastien Bertrand avec son accordéon. Mais ce récit n’est pas linéaire. Il est divisé en chapitres qui ne respectent pas forcément l’ordre chronologique. Il commence par la rencontre avec Sœur Josèphe, responsable de l’orphelinat de Beyrouth qui remet à Vincent Bouchara, premier nom de Sébastien Bertrand, son dossier en plastique jaune.
Le récit se poursuit par une réflexion sur le nom. « Je m’appelle Sébastien Bertrand, c’est mon nom. Pour l’état civil, Jean-Charles Bertrand. Mais dans l’acte de naissance, Vincent Bouchara. Puis, selon l’acte d’adoption, Vincent Jean-Charles Sébastien Bertrand. C’est quoi mon nom en fait ? Certificat de naissance. Vincent, nom emprunté, fils de Robert Bouchara, nom emprunté, et de Tania, nom emprunté, crèche Saint-Vincent-de-Paul, rite latin. C’est ça, emprunté. »
UN CONTE MODERNE…
Le récit est entrecoupé de ces réflexions, tantôt contées, tantôt chantées. Par moments, Sébastien Bertrand rapporte des dialogues téléphoniques avec sa mère adoptive restée en Vendée pendant qu’il est au Liban. Et l’accordéon fait office de second souffle. Oui, un souffle, car Sébastien Bertrand, s’il a pris l’accordéon pour faire vivre les traditions de Vendée, le manie de manière très contemporaine. On peut entendre le bruit des touches, qui fabrique un rythme, et le souffle nu, sans notes.
Tout cela, ensemble, forme un conte résolument moderne. Il y a des anecdotes, des pensées à voix haute, de l’humour et beaucoup de philosophie. Car, c’est quoi être adopté ? Sébastien Bertrand se sent vendéen mais dès qu’il atterrit à Beyrouth, il se sent aussi chez lui, là-bas. Le livre qui accompagne le CD comporte une préface « s’adopter, s’adapter » signée Catherine Dolto.
Mais plutôt que prendre les gens à rebrousse-poil, Sébastien Bertrand choisit la voie de la légèreté. En atteste cette amusante anecdote glissée en cours de conte.
« L’autre jour, rendez-vous avec le responsable des spectacles de Vendée. Je suis avec un musicien qui a un nom arabe mais pas du tout le physique. Il joue avec moi dans le groupe Sloï. On est là parce qu’on se dit que ça serait bien que les spectacles soient aussi des spectacles de Vendée, pas juste en Vendée.
– Bonjour.
– Alors vous venez me parler du projet de Sloï ? On dirait un nom juif ; ça veut dire quoi ?
– Soleil en parler maraîchin.
– Ah bon ! Bon alors vous savez qu’au conseil général, on encourage les initiatives vraiment vendéennes ; mais vous monsieur, votre nom, c’est pas un nom d’ici ça ?
– Non, mon père courait après les chameaux au Maroc.
– Ah, heureusement que toi, Sébastien, tu es vraiment un Maraîchin pure souche.
– C’est sûr, je suis né à Beyrouth… »
… À APPRÉCIER ÉGALEMENT SUR SCÈNE
Sur scène, puisque le conte est également joué sur scène, la légèreté est aussi de mise. Le décor, sobre, est composé de deux lampadaires, d’un banc sur lequel est posé une enveloppe en plastique jaune et d’un vieux magnéto, hommage au père adoptif de Sébastien, avec qui il passait des « journées de collectage » et symbole de l’archivage, de la bande enregistreuse que l’on peut rembobiner. Et Sébastien qui raconte cette histoire, son histoire, accompagné de son accordéon qui, nous dit-il, depuis qu’il l’a adopté à l’âge de 7 ans, fait qu’il ne se sent « plus jamais seul. »
Un conte moderne, raconté sans pathos mais avec poésie, à voir sur l’une des dates de la tournée française qui se profile :
16 décembre : Carquefou (44 ) – 7 janvier : Ancenis (44) – 24 janvier : Quétigny- 3- 11-12 février : Chant’appart (85) – 7 février : Challans (séance scolaire dans l’auditorium du Lycée Truffaut) – 17 mars : Chant’appart (85) – 22 mars : Plessé (44) – 23 mars: Saint Gorgon (56) – 24 mars : Massérac (44) – 17 avril: St Brévin les Pins (44) – 5 mai : Saint Hilaire de Riez (85) 7 juin : Vitré (35)
+ d’autres dates à venir sur le site de la CAHPA
YANNICK JAULIN
« Loin des formes traditionnelles et pourtant obsédé par la réécriture des mythes, des contes et leur replacement dans nos quotidiens, je cherche un lieu commun pour trouver un possible frémissement collectif. J’aimerais me définir comme faisant un théâtre de l’humanité. »
Yannick Jaulin a commencé sa carrière d’auteur en collectant le parler régional et les contes. Il devient ensuite l’étendard d’une génération de conteurs en croisade pour la modernisation de cette forme de littérature orale. Souvent accompagné de musiciens, il se voit attifé de l’attribut de conteur « rock’n roll ». Proche du milieu théâtral, son écriture et son jeu d’acteur révèlent un questionnement permanent : « que et comment raconter aujourd’hui ? »
SÉBASTIEN BERTRAND
« J’ai été adopté à l’âge de 9 mois, je suis né à Beyrouth pas en Vendée… »
Comme il le raconte dans Chemin de la belle étoile, Sébastien Bertrand adopte l’accordéon à l’âge de 7 ans. Dès lors, il décide de faire de la musique son métier et de faire vivre les traditions de Vendée. Il fonde la Compagnie des Arts d’Hier Pour Aujourd’hui afin de développer des projets artistiques contemporains, entre théâtre, musique et danse. Sa rencontre artistique avec Yannick Jaulin le ramène à ses origines libanaises et donne naissance au projet Chemin de la belle étoile. Dès lors, il s’inspire de tous les folklores, « d’ici et de là-bas ».
Marie Gallic
Photo : Doumé
> site de la Compagnie des Arts d’Hier Pour Aujourd’hui (CAHPA) de Sébastien Bertrand
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