Écoutez ici le premier poème jamais enregistré
Moins connu en France, le poète Robert Browning est adulé en Angleterre et même reconnu comme l’un des deux plus grands créateurs poétiques de l’Angleterre victorienne. Ce qui est moins connu, c’est qu’il est probablement le premier auteur à avoir procédé à un enregistrement de son poème.
L’enregistrement a été réalisé en 1889 sur cylindre phonographique, un ancêtre du disque en étain, qui était utilisé depuis l’invention du phonographe par Thomas Edison en 1877. L’œuvre enregistrée s’intitule : « They Brought the Good News from Ghent to Aix » .
Le problème, c’est que Browning a été invité à réaliser cet enregistrement au débotté, sans s’y être préparé, lors d’une fête. On l’entend donc hésiter, se tromper, bégayer et enfin s’excuser de ne pas se souvenir de ses propres vers. On l’entend toutefois préciser :« Mais ce dont je me souviendrai toute ma vie, c’est la sensation étonnante produite par cette merveilleuse invention. » Lors du premier anniversaire de la mort de Browning, le 12 décembre 1890, des membres de la London Browning Society se sont réunis pour écouter l’enregistrement.
Cet enregistrement a en effet une place toute symbolique pour cet auteur qui a toujours insisté sur l’oralité de ces textes, ce qui a notamment inspiré le poête T.S. Eliot. L’un de ses amis racontait ainsi à l’époque dans le London Times : « Jusqu’à hier, le cylindre de cire contenant le disque n’avait révélé son secret. Après avoir été mis sur la machine, la été reproduite avec précision. Dans un silence haletant pour le petit groupe impressionné se tenant autour du phonographe, la voix familière et joyeuse de Robert Browning s’exclama soudain: «Prêt?» »